Assises : l’importance d’être actif dans les débats

Par un arrêt en date du 27 novembre 2019, F-P+B+I, n° 18-83.942, la Chambre criminelle de la Cour de cassation vient utilement rappeler aux praticiens l’importance qu’il y a, au cours des débats, à se saisir, dans les formes prévues par la loi, des incidents survenus à l’audience, sauf à ne plus pouvoir utilement les discuter devant elle.

Suite à une condamnation en appel à une peine de vingt-cinq années de réclusion criminelle pour assassinat par conjoint, l’accusé a formé un pourvoi en cassation : il contestait la régularité de l’audience en s’appuyant sur le procès-verbal des débats.

Tant la loi (art 306 cpp) que la jurisprudence (Crim. 9 avr. 1986, n° 85-93.491, Bull. crim. n° 120 ; 24 juin 1998, n° 97-84.657, Bull. crim. n° 205 ; D. 1998. 228) rappellent, par principe, que les débats devant la cour d’assises sont oraux.

En effet, la conviction de la cour doit se forger non pas sur le fondement des pièces de procédure écrites mais au bénéfice d’une instruction orale à l’audience.

Aux termes de l’article 378 du code de procédure pénale, le greffier dresse un procès-verbal des débats, qu’il cosigne avec le président.

Établi au plus tard dans les trois jours du prononcé de l’arrêt, il s’agit là d’une pièce essentielle de la procédure d’audience, qui témoigne des faits survenus au cours des débats et atteste de l’accomplissement des formalités substantielles prévues par la loi.

L’absence de ce procès-verbal entraîne l’annulation des débats, de la déclaration de la cour et donc de l’arrêt (Crim. 9 janv. 1963, n° 62-92.690, Bull. crim. n° 14) – tout comme le défaut de signature du président ou du greffier d’audience (Crim. 14 févr. 2001, n° 00-84.241 ; 18 déc. 2013, n° 12-87.030, Dalloz jurisprudence).

En l’espèce, l’accusé soulevait une atteinte au principe de l’oralité des débats. Au cours de l’exposé de deux experts, le président avait communiqué, à la cour et aux jurés, trois pièces issues de la procédure d’instruction, pour faciliter la compréhension de l’affaire.

Toutefois, préalablement à cette communication, le président semblait ne pas avoir donné lecture contradictoire desdites pièces – le procès-verbal des débats précisant qu’aucune observation n’avait été faite à ce sujet, ni par le ministère public ni par aucune des parties.

La Cour de cassation constate qu’aucune mention du procès-verbal ne vient effectivement corroborer l’existence d’un débat contradictoire sur ces pièces : néanmoins, « la cassation n’est pas encourue, dès lors que l’absence de tout incident contentieux ou demande de donné acte fait présumer qu’aucune irrégularité de nature à porter atteinte aux droits de la défense n’a été commise ».

Cette solution, déjà énoncée par la chambre criminelle (Crim. 16 nov. 2016, n° 15-85.926, Dalloz jurisprudence), prescrit une parfaite réactivité aux conseils des parties puisque, en l’absence d’une quelconque initiative de leur part au cours des débats, aucune irrégularité ne pourra être utilement soutenue par la suite.

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La Cour d’Assises

1. La compétence de la Cour d’assises

La Cour d’assises est compétente en matière de crimes, c’est-à-dire pour les infractions les plus graves (homicide volontaire, assassinat, viol, séquestration, etc.) qui sont assorties des peines les plus lourdes (la plus extrême étant la réclusion criminelle à perpétuité).

La Cour d’assises est compétente pour juger les crimes en premier ressort ou en appel (article 231, Code de procédure pénale). En effet, une loi du 15 juin 2000 a institué pour la première fois en France un appel contre les arrêts rendus en matière criminelle (article 380-1 à 380-15, Code de procédure pénale), cet appel étant porté devant une autre cour d’assises. Le droit d’interjeter appel appartient à tout accusé condamné par une cour d’assises de premier ressort, au ministère public, au procureur général, même si l’accusé a été acquitté.

En revanche, la partie civile (victime) ne peut pas faire appel d’un arrêt d’acquittement. Elle ne peut faire appel que sur les intérêts civils (montant des dommages et intérêts…).

2. La composition de la Cour d’Assises

La Cour d’Assises est composée de trois magistrats professionnels (un président et deux assesseurs) et de jurés, qui sont de simples particuliers désignés par voie de tirage au sort. Le jury de jugement est composé de six jurés lorsque la cour statue en première instance et de neuf jurés lorsqu’elle statue en appel.

Le juré doit être âgé au minimum de 23 ans, être titulaire de ses droits politiques, civils et de famille, savoir lire et écrire en français, ne pas être sous sauvegarde de justice, ni sous curatelle, ni sous tutelle, et ne pas souffrir d’incompatibilités (articles 257 et 291, Code de procédure pénale). La loi écarte aussi ceux dont ont pourraient douter d’un défaut de moralité, comme les individus en état d’accusation, ceux en détention provisoire, ceux ayant étaient condamnés à une peine au moins égale à 6 mois d’emprisonnement…

Les magistrats et les jurés délibèrent et votent ensemble sur les faits et sur l’application du droit.

3. Les délais pour former appel

Selon l’article 380-9 du Code de procédure pénale :

« L’appel est interjeté dans le délai de dix jours à compter du prononcé de l’arrêt.

Toutefois, le délai ne court qu’à compter de la signification de l’arrêt, quel qu’en soit le mode, pour la partie qui n’était pas présente ou représentée à l’audience où le jugement a été prononcé, mais seulement dans le cas où elle-même ou son représentant n’auraient pas été informés du jour où l’arrêt serait prononcé. »

Cependant, l’article 380-10 Code de procédure pénale précise que : « En cas d’appel d’une partie, pendant les délais ci-dessus, les autres parties ont un délai supplémentaire de cinq jours pour interjeter appel ».