Garde à vue: le Conseil constitutionnel valide – à tort – les dispositions contestées

Dans sa décision du 18 novembre 2011, le Conseil constitutionnel a validé vendredi dernier toutes les dispositions du nouveau régime de garde à vue, n’émettant qu’une simple réserve sur l’« audition libre ».

Estimant que les droits de la défense restent insuffisants en dépit de la réforme de la garde à vue instaurée au printemps 2011, les avocats avaient demandé aux « Sages » de contraindre le gouvernement à revoir une nouvelle fois sa copie. En juillet 2010, le Conseil constitutionnel avait censuré l’ancienne loi sur la garde à vue, qui ne prévoyait qu’une présence très limitée de l’Avocat (entretien de 30 minutes).

Depuis la réforme, les Avocats peuvent assister aux interrogatoires. Mais ils avaient contesté par le biais de questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) le fait de ne pas avoir accès aux dossiers de leurs clients, de ne pas pouvoir poser librement des questions ou encore de ne pas être présents lors de tous les actes de procédure (perquisitions, saisies, etc.).

Mais le Conseil Constitutionnel a jugé leurs griefs hors sujet, les déclarant « inopérants » dans sa décision.

Il a jugé que « la garde à vue demeure une mesure de police judiciaire qui n’a pas pour objet de permettre un débat contradictoire sur sa légalité ou le bien-fondé des éléments de preuve »« Un tel débat aura sa place devant la juridiction d’instruction ou de jugement », a-t-il fait valoir.

Il a en revanche émis une réserve sur la mesure dite d' »audition libre » d’une personne par des enquêteurs. Les enquêteurs pourront continuer d’entendre en dehors du régime de garde à vue, et sans avocat, une personne soupçonnée d’avoir commis une infraction, si elle y consent. Mais ils devront l’informer de son droit de quitter les locaux de police ou de gendarmerie à tout moment, et de la nature et de la date de l’infraction dont elle est soupçonnée.

Cette décision, soulignons-le, est particulièrement décevante.

Le juge des enfants va devenir un juge comme un autre

Dans sa décision du 8 juillet 2011, le Conseil constitutionnel s’est montré novateur en matière de justice des mineurs.

Désormais, le juge des enfants ne pourra plus cumuler les fonctions d’instruction et de jugement.

Finie donc la spécificité que l’on retrouvait dans l’Ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante qui prévoyait que le  juge des enfants  était responsable de la direction d’enquête sur les faits reprochés au mineur et, ensuite, si celui-ci était renvoyé devant le tribunal pour enfants, de la présidence de cette juridiction avec deux assesseurs choisis « en raison de leur intérêt pour les questions de l’enfance ».

Pour le Conseil constitutionnel, ce cumul était inacceptable et incompatible « avec le principe d’impartialité des juridictions » puisque le juge des enfants, ayant ordonné le renvoi devant le tribunal pour enfants, rendait ainsi « un préjugement » qui laissait au moins planer un doute sur son objectivité ultérieure.

Cette scission est capitale pour la justice des mineurs.

En effet, on tend ainsi à appliquer à cette justice des mineurs les grands principes de la procédure pénale que l’on retrouve chez les majeurs et donc à la sortir de cette autarcie qui conduisait souvent à privilégier l’éducatif plutôt que le répressif.

Car ce que Conseil constitutionnel a voulu rappeler, dans sa décision, c’est que le juge des enfants est un magistrat comme les autres soumis aux contraintes et aux règles qui garantissent une bonne justice pour les plus de dix-huit ans.

Reste à savoir désormais quelles leçons le législateur va en tirer de cette décision, pour l’avenir.